Garder le silence
(6 août – Transfiguration du Seigneur, année C, Luc 9, 28b-36)
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« Je ne peux pas contempler Dieu directement. Car c’est un peu comme quand je dois regarder une étoile éloignée sur le côté pour pouvoir la voir. Je dois aussi détourner légèrement mon regard pour apercevoir Dieu. Un Dieu qui peut créer toutes les planètes, les galaxies, les quasars, les arbres et les fleurs est paré d’une gloire trop éclatante pour être contemplé directement. C’est comme un bruit immense trop fort pour mes oreilles. »
Ces mots de Kristen Johnson Ingram*, je me les répète en pensant au visage du Christ « transfiguré », une beauté dont Pierre, Jacques et Jean doivent faire l’expérience dans le silence. D’ailleurs, quand nous regardons le ciel plein d’étoiles, cela nous arrive souvent de dire : « Chut, regarde, et tais toi! »
Ce qui arriva aux trois amis de Jésus sur la montagne les laissa sans voix. Ils ne pouvaient même pas tenter de l’expliquer, car c’était tellement exceptionnel, tellement mystérieux. Finalement, ils ne cherchèrent même pas à en parler. Ils suivirent probablement sans difficulté l’ordre que leur donna Jésus : ils gardèrent le silence. Ils ne firent état des souvenirs de cet événement, la Transfiguration du Christ, que quelques années plus tard rappelant l’image éclatante que leur donnait Jésus entouré de Moïse et d’Elie.
Mais comment appréhendons-nous ce mystère de la Transfiguration aujourd’hui ? En effet, nous cherchons trop souvent à lire les expériences que nous vivons uniquement à travers des critères de Raison. Les vérités sont analysées, mesurées, pesées et décortiquées. Cette approche scientifique est le fondement de notre « modernité ». La Raison devient de plus en plus le seul critère de jugement et l’on entend dire: « si ce n’est explicable, ce n’est pas réel et donc ce n’est pas vrai. »
Le livre du théologien William Placher** explique bien le piège qui nous est tendu : toute transcendance dans notre vie se trouve rejetée car elle n’est pas « domesticable » par notre pensée moderne. De même, petit à petit, Dieu perd toute transcendance, toute sainteté. Nous n’avons plus qu’une vue extrêmement simpliste d’un Dieu qui nous donne « un petit coup de main » pour résoudre nos petits problèmes de tous les jours !
La Transfiguration du Christ ne peut s’appréhender qu’au travers de la présence de Dieu. Croire en Dieu, c’est croire humblement qu’en réalité il existe quelque chose au-delà de l’explicable. C’est en fait un acte de modestie intellectuelle où l’on admet qu’il y a une foule de choses que nous ne comprenons pas et qu’il y a un mystère au cœur de ce monde.
Ne descendons donc pas trop rapidement de la montagne ! Restons en contact avec l’Inexplicable ! Gardons de l’altitude, prenons le temps de réfléchir et de faire un peu d’espace dans nos vies. Et n’oublions pas que certaines expériences dans nos propres vies n’ont qu’une seule bonne réponse : le silence.
Bernard Vollerin
* Pasteur à la “West End United Methodist Church” de Nashville (Tennessee); publication “Weavings”, 2007.
** « The domestication of Transcendence: How Modern Thinking about God Went Wrong », Westminster John Knox Press, 1999.
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Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc (Lc 9, 28b-36)
28 Jésus prit avec lui Pierre, Jean et Jacques, et il alla sur la montagne pour prier.
29 Pendant qu’il priait, son visage apparut tout autre, ses vêtements devinrent d’une blancheur éclatante.
30 Et deux hommes s’entretenaient avec lui : c’étaient Moïse et Élie,
31 apparus dans la gloire. Ils parlaient de son départ qui allait se réaliser à Jérusalem.
32 Pierre et ses compagnons étaient accablés de sommeil ; mais, se réveillant, ils virent la gloire de Jésus, et les deux hommes à ses côtés.
33 Ces derniers s’en allaient, quand Pierre dit à Jésus : « Maître, il est heureux que nous soyons ici ! Dressons donc trois tentes : une pour toi, une pour Moïse, et une pour Élie. » Il ne savait pas ce qu’il disait.
34 Pierre n’avait pas fini de parler, qu’une nuée survint et les couvrit de son ombre ; ils furent saisis de frayeur lorsqu’ils y pénétrèrent.
35 Et, de la nuée, une voix se fit entendre : « Celui-ci est mon Fils, celui que j’ai choisi, écoutez-le. »
36 Quand la voix eut retenti, on ne vit plus que Jésus seul. Les disciples gardèrent le silence et, de ce qu’ils avaient vu, ils ne dirent rien à personne à ce moment-là.